CHARLES PAYEN : l'appel du grand trail, en résistance, en endurance
Mais qui est donc ce Charles qui se trimballe en queue de course, à une allure de randonneur plus que de trailer ? Delphine et Béthy, fermeuses sur la première section de Tarn Valley Trail sont très interrogatives «à cette allure, mais jamais, jamais, il ne pourra passer ne serait-ce que la première barrière horaire prévue à Pont de Montvert et encore moins finir« .
Sauf qu’elles ne connaissent rien de ce Charles que le microcosme de l’ultra surnommait dans un passé récent Charles-Hercule Payen. Payen de son vrai nom et Hercule pour son côté «herculéen» à courir et dévorer chaque week end sa grosse part de gâteau, autrefois sur la route (une Transe Gaule et une Mil’Kil dans la musette) et aujourd’hui plus régulièrement sur chemins.
Charles Payen est en effet un ovni discret et apprécié dans cet univers, sorte de gentil loup solitaire avec une stratégie bien à lui, terminer les courses à l’économie, à la limite des cut-off pour remettre les couverts la semaine suivante.
Et ce fut bien le cas lors de la Tarn Valley Trail dans le sillage de Delphine et Béthy les deux infirmières de Millau soucieuses du destin de ce grand gaillard appliqué à prendre le temps qu’il faut, hymne à la lenteur contrôlée dans ces paysages cévenoles bombardées de couleurs printanières et de fortes senteurs.
Finalement au détour d’un bois, d’une rencontre avec deux coureurs inattentifs au balisage, d’un papotage avec Myriam Ezzedine, Charles fila, chemin faisant, déroulant son grand pas mesuré, des pensées très personnelles se bousculant tout en syncope pour vivre cet ultra à sa façon, une longue très longue interrogation, une longue très longue intériorisation.
Et quelle ne fut pas la surprise de Delphine (elle troquera cette année son tablier de bénévole pour courir la Boffi Fifty), surprenant Charles à l’arrivée, bien attablé, à se restaurer après 35 heures, 59 minutes et 56 secondes d’un effort « gargantuesque » stratégiquement bien planifié. En course, il reçoit ce message de Bruno, un copain de virée pyrénéenne «aujourd’hui, encore une fois, tu vas ramasser les cadavres». Prédiction confirmée, cette progression se mesure, s’affirme, régulière au fil des villages traversés, 256ème à Pont de Montvert, 195ème à Rieisse au 100ème kilomètre pour gratter encore 36 places jusqu’à Millau en se classant 159ème.
Ainsi va la vie de Charles, de course en course, la France en diagonale, en transversale, chaque week-end en transhumance, une forme d'errance, nos contrées traversées dans sa petite voiture et ces retours au bercail, les jambes en feu, le corps en vrac, ses fringues sales dans un gros sac.
Personnage digne d’un roman, d'une réelle modestie, tout en discrétion, ne laissant aucune trace, ni même une seule de ses pensées s’échapper pour couronner un de ses multiples exploits pédestres farouchement anonymes.Ne chercher pas, non, vous ne trouverez rien ou presque rien de sa part sur les réseaux sociaux, sans coms, sans likes pour valider l’extraordinaire de son quotidien qu’il doit estimer tout bonnement ordinaire.
Sur Betrail, 196 résultats lui sont attribués dont 136 ultras depuis 2016, 13 déjà courus pour l’année 2022.
En creusant sur Kikourou, l’ultrafondu émarge déjà en 2011, un Templiers et un 100 km de Millau en rodage et vlan !!! une année 2012 à bloc, 22 courses dont trois marathons, quatre 100 kilomètres, neuf ultras et ce fameux triptyque Endurance Trail + Marathon des Causses + Templiers, le grand chelem pour le grand Charles livrant bataille, l'appel du grand trail, en résistance, quelle endurance !
Photo : Rencontre furtive avec Charles Payen lors de la Tarn Valley Trail au ravito de Paulhe Parc naturel régional des Grands Causses Explore Millau Parc national des Cévennes
Post Facebook le 07 JUILLET 2022
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